Nos premiers pas au Cambodge

Visa cambodgien

À chaque nouvelle étape de notre tour du monde, nous confrontons nos regards sur nos premiers pas. La première impression est-elle la bonne ? Démontrons le contraire ou confirmons la règle. Sixième pays : le royaume du Cambodge.

[Récit de notre passage de frontière entre le Laos et le Cambodge le 30 janvier 2020]

Frontière déserte (par Pierre)

Quitter le Laos en bateau. Mettre pied à terre. S’engouffrer dans un bus déniché dans un bled au large des 4.000 Îles. Arriver au poste frontière de Veun Kham.

Quitter les Laotiens et leur leitmotiv inspiré d’André Gide : « Il n’y a pas de problème, il n’y a que des solutions ». Mettre à l’épreuve nos sentiments de séparation. S’engouffrer dans un nouveau pays. Arriver devant un désert.

Ma première impression du Cambodge se résume à cet ensemble vide qui nous attend de l’autre côté de la frontière. On y arrive à pied. Le bus nous a déposés à la limite du Laos et s’en est vite retourné pour chercher d’autres passagers.

Peu de Laotiens avec nous : comme nous l’avait confié Synai sur le plateau des Bolovens, les pays frontaliers sont « trop chers » pour eux… Alors, comme nous, des backpackers occidentaux découvrent les premières mesures sanitaires liées à l’épidémie de coronavirus venue de Chine (nous sommes le 30 janvier et l’OMS ne parle pas encore de « Covid-19 »).

C’est ainsi qu’un homme en uniforme, enfermé depuis sa guérite, nous tend un masque médical en papier tenu précautionneusement entre deux doigts. Nous n’avons pas encore entendu parler de « gestes barrières » mais à ce poste frontière on tient déjà les étrangers à bonne distance et on les équipe avant de leur prendre la température.

Premières maisons cambodgiennes

La mesure paraît peut-être dérisoire — elle permet surtout de faire entrer un dollar par touriste qui se fait ainsi « dépister » — mais elle montre à quel point le danger est pris au sérieux dans ce petit pays indochinois visité chaque année par plus de 5 millions de visiteurs (chiffres avancés par les autorités).

Nous passons le test avec succès : nous n’avons pas de fièvre. Nous pouvons alors entrer dans le grand bureau où on nous tamponne le passeport auquel on accole un certificat de bonne santé : le sésame !

Le royaume du Cambodge s’ouvre enfin à nous ! Mais l’émerveillement est loin d’être celui de la caverne d’Ali Baba : ici, c’est un immense panneau à la gloire du parti unique qui dirige l’État depuis des temps immémoriaux qui fait office de « Bienvenue ». Derrière, le Cambodge n’est qu’une longue plaine ; loin des paysages vallonnés du Laos.

Après quelques dizaines de mètres de marche, après un dernier contrôle des passeports, on tombe sur une succession de baraquements qui font office de restaurant / café / agence de voyage et nous raccrochent un tant soit peu à la vie.

Et nous attendons… Nous attendons dans un calme frontalier pas vraiment rassurant… Nous attendons qu’un véhicule veuille bien nous transporter à travers ce désert d’incertitude… Et nous buvons un café.

Poste frontière de Veun Kham

Le Laos asséché (par Matthieu)

Chaleur, sécheresse, poussière… La frontière entre le Laos et le Cambodge est aussi celle entre l’eau et le désert. Oublié, l’archipel des 4.000 îles du Mékong, sa nature verdoyante, sa faune aquatique. Lorsque nous arrivons à Veun Kham, qui marque la délimitation entre les deux pays, c’est une gigantesque plaine aride qui s’ouvre devant nous. Comme si les ruisseaux, les rivières et les fleuves qui ont accompagné notre traversée du pays au million d’éléphants n’étaient pas autorisés à franchir la barrière.

Le Cambodge est à la fois si proche et si différent du Laos. Nouvelle palette de couleurs. Les arbres sont roux, les herbes jaunes, la terre est rouge. Ces teintes ne nous quitteront plus, jusqu’à recouvrir nos vêtements. Mais même hospitalité sincère des habitants. On le constate au simple achat d’une carte SIM à 1$. La femme installée dans une petite guérite en bois ne parle que le cambodgien. Elle nous explique du mieux qu’elle peut comment activer la ligne téléphonique. On la remercie et on s’installe au café voisin en attendant notre bus.

Mais dix minutes plus tard, elle quitte sa boutique pour nous rejoindre. Elle veut s’assurer que nous avons réussi. Entre temps, elle a tout récapitulé sur un papier pour nous faciliter la tâche. Puis, convaincue que cela ne suffit toujours pas, elle part chercher un homme qui parle anglais afin qu’il vérifie à son tour que tout va bien. Plus que du zèle professionnel — déjà très appréciable — une vraie volonté d’entraide. Comme au Laos, on vous prend par la main et on ne vous lâche pas tant que vous ne savez pas marcher seul.

Rebelote quand on s’aperçoit que notre compagnie de bus a mal compté le nombre de passagers : le van qui devait nous reprendre côté Cambodge est trop petit pour tous les voyageurs que nous sommes. On reste bêtement sur le bas côté en le regardant partir. Le responsable de la compagnie concurrente, désolé pour nous, décide alors de prendre les choses en main. Nous ne sommes pas ses clients ? Qu’importe. Il mobilise un chauffeur et un van pour nous seuls… et à ses frais ! Juste pour nous aider.

Quoi qu’il arrive ces prochaines semaines au Cambodge — et il nous en arrivera, des péripéties — on sait déjà qu’on sera entouré et aidé autant que de besoin. Alors, il n’y a plus qu’à se laisser porter sur la route jusqu’à notre première étape.

Bienvenue au Cambodge !

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