Laos : notre bilan

Après 26 jours passés au Laos, 2.580 kilomètres parcourus en 8 étapes chez les Lao des plaines, les Lao des plateaux et les Lao des sommets, nous voilà à l’heure du bilan. Comment avons-nous vécu ce périple au cœur du pays du million d’éléphants ? Notre mission : résumer nos impressions laotiennes en quelques lignes. C’est parti !

[Bilan de notre séjour au Laos du 4 au 30 janvier 2020]

Comme chez soi (par Matthieu)

Quel crève-coeur ! Tout comme pour l’Inde, au début de ce tour du monde, mais pour des raisons bien distinctes, quitter le Laos est pour moi un déchirement. En quatre semaines, ce petit pays que je ne connaissais pas, que je n’avais jamais envisagé de visiter, que je peinais même à placer précisément sur une carte, a non seulement réussi à me charmer mais aussi à me convaincre que j’étais ici chez moi.

Certes, comme chacun, le Laos a ses défauts et ses démons. On les a souvent décrits au fil de nos articles. C’est le pays le plus miné au monde – il faudra un siècle pour l’en sauver. C’est un pays sous-développé, à la pauvreté chronique, qui vit à grands renforts d’aides internationales. C’est un pays qui ne connaît pas la démocratie – c’est peu de le dire. C’est un pays que l’on ravage en construisant à marche forcée une centaine de barrages hydrauliques dont on voit mal quels bénéfices réussiront à compenser les dégâts.

Reconstruction du temple au village de Tad Lo

Mais le Laos, c’est aussi, pour le moment, un patrimoine naturel exceptionnel. Des paysages de montagnes et de jungles à couper le souffle où, pour la première fois de ce voyage, on s’est véritablement senti coupé du monde. Le Mékong et tant de rivières que l’on a admirés du matin au soir, sans pouvoir les quitter du regard, et qui nous ont apporté une quiétude qu’on ne pensait pouvoir atteindre. 

Le Laos, c’est aussi des liens particuliers avec la France. Maillon de l’Indochine coloniale, il en a conservé les vestiges : de magnifiques bâtiments comme à Louang Prabang et à Vientiane, d’agréables habitudes gastronomiques tels que les viennoiseries et les sandwichs. Et surtout un attachement sincère à la langue française, que l’on aperçoit toujours au fronton des écoles ou sur les panneaux des rues, que l’on entend aussi avec émotion dans la bouche des anciens.

Loin de se débattre avec cet héritage, de renier ce temps où la France imposait doctement sa volonté, le Laos en a fait une brique assumée de son Histoire et de son identité. Une identité si forte qu’elle lui a permis de surmonter toutes les conquêtes et tentatives d’assimilation : celles de l’Hexagone, mais aussi celles de ses expansionnistes voisins de Thaïlande et du Vietnam. La bataille avec la Chine n’est pas terminée, mais gageons qu’il en sortira encore une fois vainqueur.

Un écolier à Nalan Neua

Cette identité, les Laotiens la portent avec une sérénité et une assurance détonnantes. Une sorte de nationalisme tranquille, sans véhémence, sans défensive. Ils sont fiers d’eux-mêmes sans avoir besoin de le dire. Ils semblent avoir une confiance absolue en ce qu’ils sont et en où ils vont.

À vrai dire, rarement nous avons vu un peuple si apaisé. Non pas résigné, mais bien apaisé. Et cela jusque dans ses minorités, autrefois malmenées, désormais de plus en plus admises par le pouvoir central. Un peuple solidaire aussi. À chaque coin de rue : de l’entraide, du respect, des personnes qui prennent soin des autres. Non pas par pression sociale. Simplement par bienveillance.

Ainsi, pour les Laotiens, accueillir l’étranger, côtoyer “l’autre” ne provoquent aucune crainte, ne motivent aucun repli sur soi : ce ne sont que l’occasion précieuse de partager. Dès notre premier jour, on se trouva embarqué dans une fête de famille. À chaque étape, on ressentit la gentillesse et la protection des personnes qui nous entouraient. Le partage, on l’a aussi vécu avec Nang, à Paksé, lorsqu’elle nous raconta l’histoire tourmentée de sa famille, toujours avec cette confiance, presque cette foi, que le destin de l’Homme est bon. Comment ne pas se sentir bien dans ces conditions ?

Fête de famille à Huay Xai

Au moment de tirer le bilan de l’Inde, j’écrivais avec tristesse que jamais nous ne retrouverions pays aussi intense. Je sais à présent que je me trompais. Le Laos l’a été. À sa manière, mais tout autant.

Le Laos est une fête (par Pierre)

C’est par une ivresse familiale que nous avons intégré le Laos début janvier. C’est au lendemain de l’anniversaire de Matthieu que nous quittions, à regret, ce petit paradis terrestre. Oui, le Laos est notre belle surprise de ce début de tour de monde. Après cinq mois de vadrouille, on a un petit recul pour pouvoir l’affirmer.

Alors évidemment le Laos ce n’est pas que le lao lao, ce « whisky » frelaté distillé dans les arrière-cours des maisons ; le Laos ce n’est pas non plus uniquement les concours improvisés de karaoké en famille ou entre amis ; le Laos ce n’est pas seulement la facilité, la décontraction, la détente.

Sur le pont reliant Don Khon à Don Det

Le Laos, c’est un pays toujours dirigé par le même parti politique depuis 1975. Le Laos, c’est aussi une population qui vit avec la peur des bombes à sous-munitions. Le Laos, c’est tout ça dans une insouciance apparente et dans un accueil sincère.

Jamais on ne s’est senti aussi bien dans un nouveau pays. À l’aise. Nager à la piscine municipale de Vientiane est loin de faire partie de la bucket-list des tourdumondistes d’Instagram. Et pourtant : c’est l’un de mes moments préférés de ce séjour.

La simplicité du Laos, ses jungles du Nord si préservées où vivent encore des minorités que les autorités souhaitent soutenir en faisant venir un tourisme responsable. La simplicité des Laotiens qui trouvent toujours une solution que l’on soit un Lao ou un étranger.

La joie d’être ensemble car il y a toujours quelque chose à fêter. Le plus drôle, c’est que les week-ends sont calmes… Mais les dimanches soirs assez animés : une bonne excuse pour ne pas aller bosser le lendemain (paroles de Laotiens) !

Au bord de la Nam Ou, à Nong Khiaw

Et puis la découverte des cultures de café… Même se gameller à scooter devient (presque) un moment de joie. Le calme du Mékong, ce fleuve mythique qui vaut à lui seul un voyage complet (on le retrouvera bien vite de l’autre côté de la frontière, au Cambodge).

Enfin, les surprises du tour du monde avec la rencontre de la famille Sisombat. Le Laos restera un mélange de vert même en ville, de bleu même sans la mer, de pyjamas même en journée et de soleil même la nuit. Et pour paraphraser Hemingway, si vous avez eu la chance d’avoir vécu au Laos lorsque vous étiez un jeune homme, alors, où que vous alliez pour le reste de votre vie, il reste avec vous, le Laos est une fête.

Revivez nos étapes au Laos

5 commentaires sur “Laos : notre bilan

  1. Merci pour ce témoignage très humain, qui au delà des beautés du pays , nous fait partager les belles personnes que vous avez rencontré. Vive le Laos, mais vive avant tout les Laotiens croisé.e.s sur votre chemin

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