Cambodge : notre bilan

Cambodge : notre bilan

Après 27 jours passés au Cambodge, 2.162 kilomètres parcourus en 10 étapes le long du Mékong, nous voilà à l’heure du bilan. Comment avons-nous vécu ce périple au cœur du royaume khmer ? Notre mission : résumer nos impressions cambodgiennes en quelques lignes. C’est parti !

[Bilan de notre séjour au Cambodge du 30 janvier au 26 février 2020]

Insondable mystère (par Matthieu)

“Un tour du monde, ce ne sont pas des vacances” : avec Pierre, nous vous l’avons écrit en cœur dans nos articles depuis août 2019. Sur ce point, le Cambodge a de très loin dépassé nos espérances.

Accident de scooter dans le Ratana Kiri, grosse fièvre à Phnom Penh, vol d’une partie de nos affaires sur la route de Siem Reap, soucis de visas pour rejoindre le Vietnam… C’est peu dire que ce mois passé ici n’a pas été un long fleuve tranquille. Et pourtant, ce mois, je l’ai adoré.

Loin de nous décourager ou de nous déprimer, ces déboires ont eu pour moi – mais je le crois aussi pour Pierre – un vrai goût d’aventure. Ils nous ont poussé dans nos retranchements, ils ont éprouvé notre adaptabilité, ils ont fait monter notre adrénaline. Parfois, on a franchement eu peur. Mais tant mieux, car on ne se sent jamais aussi vivant que dans l’adversité.

Jeunes moines demandant l’aumône à Sen Monorom

À l’heure de tirer le bilan, on sourit d’autant plus à ces mésaventures… qu’elles n’étaient finalement pas si graves. Nous avons toujours pu compter sur de l’aide, tout s’est toujours bien terminé. Et puis le Cambodge a surtout été jalonné de quantité de beaux instants.

Les temples d’Angkor, les dauphins de Kratie, le poivre et les marais salants de Kampot… Patrimoine et nature nous en ont mis plein les yeux. Tout comme au Laos, nous avons aussi rencontré un peuple résolument bienveillant envers les voyageurs, peut-être même avec davantage de caractère et d’aspérité en raison de sa part insondable de mystère : celle d’avoir vécu et surmonté l’un des drames du XXe siècle.

À l’heure de faire nos adieux au pays, je dois dire que je ne comprends toujours pas comment, il y a quarante ans, les Cambodgiens ont pu ainsi sombrer dans le génocide, comment il y a trente ans bourreaux et victimes ont su se réconcilier, comment aujourd’hui ils refont peuple comme si rien ne s’était passé…

Il y a là un “extrémisme” de la résilience qui me déroute autant qu’il me fascine, une forme de miracle où le meilleur de l’humain a soudainement succédé au pire. Rien que pour cela, le Cambodge mérite d’être parcouru.

Couple sur le pont en bambou de Kampong Cham

La sérénité malgré tout (par Pierre)

Le Cambodge ne m’aura rien épargné. Blessure à scooter, vol d’argent, grosse fatigue, attente prolongée en fin de séjour,… Dès le passage de frontière, tout paraissait compliqué : nous n’avions pas fait 10 mètres dans le pays que déjà ça s’annonçait galère.

Et pourtant, le Cambodge m’a procuré aussi quelques unes de mes plus belles expériences de ce tour du monde : nager dans le Mékong, naviguer en kayak parmi les derniers dauphins du fleuve, découvrir les temples d’Angkor désertés, dormir dans un ancien cinéma, manger une tarentule, (tenter) de gober un œuf de cane fécondé, chasser un nationaliste birman d’un bar de Phnom Penh et marcher dans les rues de cette capitale que je fantasmais depuis des années au même titre que Bangkok (c’est fait) et New York (c’est fait, deux fois).

Et puis l’Histoire qui suinte de chaque pierre, de chaque regard. L’Histoire commune avec la France, d’abord, lorsque le protectorat a chamboulé l’administration et le paysage cambodgien. Il en reste malgré tout une profonde francophilie dans tout le pays et pas seulement parmi la famille royale : les enseignes en français, les études de médecine exclusivement en français, les noms des rues, l’architecture…

L’Histoire glorieuse de l’Empire khmer dont le Cambodge est le gardien et dépositaire, ensuite. Le site d’Angkor, parmi la myriade de temples à travers le pays, est en constant chantier car il faut préserver coûte que coûte ce symbole de l’unité nationale. Imaginez qu’Angkor Vat figure même sur le drapeau cambodgien : le Cambodge est le seul pays au monde à arborer un monument sur son emblème.

Groupe de pèlerins au Bokor

L’unité à travers la pierre, le religieux et la gloire millénaire qui se dresse en valeur centrale dans la vie publique comme dans les relations privées après le drame des Khmers rouges. Près d’un quart de la population a été tué à la fin des années 70. Toutes les familles ont été impliquées. Victimes ou bourreaux ? Certains bourreaux sont aussi des victimes enrôlées de force par l’Angkar, l’organisation qui dirigeait le pays à l’image du Big Brother de George Orwell.

Chaque Cambodgien a vécu dans la peur au quotidien. Cette peur s’est transmise en héritage, comme marquée dans le code génétique de chaque Cambodgien jusque dans les jeunes générations. L’unité, malgré tout, face à cette Histoire récente et douloureuse, restera pour moi l’un des plus beaux exemples de résilience. Rien n’est simple, rien n’a été facile à admettre. Mais même si le pouvoir Khmer rouge a été chassé en 1979, les milices de Pol Pot ont continué à commettre des crimes jusqu’au milieu des années 90.

Les procès ne peuvent plus aujourd’hui que soulever de vieilles histoires que beaucoup souhaitent garder ensevelies. Et même s’ils cherchent aujourd’hui un appui chinois, les Cambodgiens se relèvent seuls comme ils ont dû supporter seuls la déferlante rouge. L’unité sereine de ce peuple qui nous en aura fait voir de toutes les couleurs est inspirante. Bien que le Laos fut ma première belle surprise de ce tour du monde, les aspérités du Cambodge font de ce pays le plus attachant qui soit.

Revivez nos étapes au Cambodge

4 commentaires sur “Cambodge : notre bilan

  1. Bonjour les backpackers, un immense plaisir de vous suivre dans votre incroyable tour du monde, on se délecte toujours autant de lire vos récits de voyage👍, ce savoureux mélange de nature et culture, de bonne humeur et grosse frayeur, de visuel et d’émotionnel…bref on attend avec impatience la suite de vos aventures(sans oublier Bourriquet😉)

  2. Superbe comme d’hab ! Merci de nous faire partager ces émotions si bien décrites et pour celles qui suivront à la reprise de votre TDM

  3. Excellente synthèse , comme d’hab’ !
    Vous avez fait votre cette maxime tant de fois rebatue :  » ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts »

    Merci !

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